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La Slovénie pourrait-elle devenir le pays le plus pro-palestinien d’Europe ?

Drapeau de la Slovénie (crédit, Wikimedia Commons)

La Slovénie est devenue l’un des plus fervents défenseurs des droits des Palestiniens en Europe, une position remarquable pour un si petit pays d’Europe centrale, souvent négligé. De la reconnaissance d’un État palestinien à la première nation européenne à imposer des sanctions à Israël, Haris Tagari se demande pourquoi la Slovénie est si pro-palestinienne ?

En août 2025, la Slovénie est devenue le premier État membre de l’UE à imposer une interdiction complète sur l’exportation d’armes et d’équipements militaires vers Israël.

Cette mesure sans précédent était une réponse directe aux actions militaires israéliennes à Gaza, que la Slovénie a condamnées comme étant disproportionnées et contraires au droit international humanitaire.

En juin 2024, la Slovénie a officiellement reconnu l’État de Palestine, devenant ainsi le 147e membre de l’ONU à le faire. Cette décision était le point culminant des efforts du parti de Gauche.

Carte de la Slovénie en Europe – Balkans (crédit, Wikimedia Commons)

La Slovénie a également imposé une interdiction de voyager au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et a déclaré deux ministres israéliens d’extrême droite – Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich – persona non grata.

Il s’agissait de la première action de ce type d’un pays de l’UE contre des responsables israéliens. Le gouvernement a accusé les deux ministres d’avoir fait des « déclarations génocidaires » et d’avoir incité à la violence contre les Palestiniens.

Il a en outre déclaré que les ministres « préconisent publiquement l’expansion des colonies israéliennes illégales en Cisjordanie, les expulsions forcées des Palestiniens et appellent à la violence contre la population civile palestinienne ».

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Le soutien du public à la position pro-palestinienne de la Slovénie est important. Un sondage de 2024 publié par Dnevnik Quotidien a indiqué que près de 60 % des Slovènes soutenaient la reconnaissance de la Palestine, contre seulement 20 % contre.

Ce large soutien a fourni une base solide pour les actions du gouvernement sur la scène internationale et souligne la position ferme de la Slovénie contre les politiques qu’elle considère comme violant le droit international et les droits de l’homme.

Gouvernement de gauche

Historiquement, la politique étrangère de la Slovénie s’est caractérisée par un alignement avec les puissances occidentales, motivé davantage par des considérations géopolitiques que par une stratégie indépendante.

Cela s’est reflété dans son soutien constant aux positions américaines et européennes, reflétant les tendances plus larges parmi les anciennes républiques yougoslaves.

Toutefois, les développements récents montrent une évolution marquée vers une politique étrangère plus indépendante et plus fondée sur des principes.

Ben-Gvir (à gauche) et Smotrich (à droite). Les deux ministres israéliens extrémistes ont été bannis de Slovénie.

Le tournant est survenu avec la formation d’un nouveau gouvernement en 2022, dirigé par le Premier ministre Robert Golob du Mouvement pour la liberté (Gibanje Svoboda).

Cette coalition de centre-gauche, qui comprend le parti de gauche (Levica), a mené une politique étrangère plus affirmée.

Les actions récentes de la Slovénie la distinguent de ses homologues régionaux et l’alignent plus étroitement sur les pays nordiques dans leur soutien à la Palestine.

Levica, créée en 2017, a toujours défendu les droits des Palestiniens. Son idéologie écosocialiste et socialiste démocratique met l’accent sur l’anti-impérialisme et la solidarité avec les peuples opprimés.

L’influence du parti au sein de la coalition a été cruciale pour orienter la politique étrangère de la Slovénie vers la justice, le droit international et une défense de principes, plutôt que vers un simple opportunisme géopolitique.

Motivations

La position de la Slovénie est façonnée par son histoire et sa géographie. Située au carrefour de l’Ouest aligné sur l’OTAN et de l’Est de l’ex-Yougoslavie et de l’Union soviétique, elle n’a été ni fortement influencée par l’Occident ni totalement contrainte par l’Est.

Cela permet à la Slovénie d’envisager la crise israélo-palestinienne avec une relative objectivité, sans pressions de lobbying ni influence étrangère.

Même pendant et après l’éclatement de la Yougoslavie dans les années 1990, la Slovénie a largement évité les troubles observés dans d’autres républiques.

Manifestation « Arrêtez de bombarder Gaza » organisée dans la capitale slovène – Ljubljana, en 2014. (Crédit, MZaplotnik, Wikimedia Commons)

Sa neutralité et l’absence de divisions ethniques internes majeures signifiaient que la politique étrangère n’était pas aussi polarisée que dans des pays comme la Bosnie, où des circonscriptions nationales concurrentes bloquent souvent les initiatives pro-palestiniennes malgré un fort soutien public au sein de la population musulmane.

La Slovénie a toujours été un outsider, faisant souvent partie des empires qui la dominaient et dont elle avait du mal à se libérer.

Elle a subi la discrimination et la xénophobie de la part de nombreux voisins. Contrairement à d’autres pays, la Slovénie ne porte pas la responsabilité de l’Holocauste, puisqu’elle en a été elle-même victime.

De nombreux Slovènes ont été internés dans des camps de concentration, soumis au travail forcé et enduré des représailles massives sous l’occupation nazie et fasciste.

Cette histoire commune signifie que la Slovénie ne porte pas de « culpabilité de génocide » qui l’oblige à s’aligner automatiquement sur le « consensus international » sur Israël, comme le font souvent des pays comme l’Allemagne.

Alors que de nombreux pays à majorité musulmane restent silencieux, la position audacieuse et fondée sur des principes de la Slovénie montre que même un petit pays négligé peut diriger l’Europe dans la défense des droits des Palestiniens.

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Avatar de Abdelhafid Akhmim